Cet article de blog est un transcript de l’épisode 30 du podcast Entrepreneure Crossing, que tu peux écouter juste ici 👇
Tu veux t’abonner à mon podcast ? Clique ici pour le trouver sur ta plateforme d’écoute préférée !
Tu penses que tu ne mérites pas de pause si tu n’as pas suffisamment travaillé ? Tu te sens nul·le si tu n’as pas coché toutes les cases de ta to-do list ?
🤔 Si ces pensées te sont familières, tu es certainement victime de capitalisme intériorisé, sujet oh combien passionnant et important à décortiquer afin de comprendre pourquoi ces pensées sont récurrentes et nous font plus de mal que de bien au quotidien !
🧠 Dans ce premier épisode sur ce sujet, je te propose de décortiquer ce qu’est le capitalisme intériorisé (car, oui, j’en conviens, le mot “capitalisme” peut faire peur au premier abord) et de faire un test pour savoir si, toi aussi, tu en es victime (et il y a de GRANDES chances que cela soit le cas !).
🤯 Nous parlerons également des pensées qui influencent négativement ton bien-être professionnel (et personnel), et des raisons qui font qu’on est toutes et tous touché·e·s par cela.
Il est temps de remettre en question certaines croyances et pensées qui dictent notre quotidien d’entrepreneur·e·s, et cet épisode est une première marche vers cet objectif !
🗒️ Script de l’épisode
Je vais te lire quelques phrases, et on en parle ensuite :
- “Je ne peux pas prendre une pause, j’ai trop de travail en attente” ou alors “je prendrai une pause, mais seulement quand j’aurai terminé telle tâche, sinon, je ne mérite pas de m’arrêter”
- “Oh, je sens que je tombe malade, ça me soule, je vais pas pouvoir travailler du coup”
- “Oh la la j’ai pas avancé aujourd’hui, je me sens tellement nulle !”
- “Wow, tu as fait TOUT CA aujourd’hui ? Moi, j’ai terminé une seule tâche, je me sens un peu nulle en comparaison…”
Est-ce que ces phrases sont familières pour toi ? Est-ce que tu te les répètes en boucle, ou juste régulièrement ?
Si c’est le cas, je t’annonce que tu es certainement victime de Capitalisme Intériorisé ! Le nom est complètement barbare, mais je vais essayer de t’expliquer, dans cet épisode, de quoi il s’agit exactement, de l’origine de ces pensées qui, concrètement, te font du mal et je vais te parler aussi de comment amorcer une réflexion sur le sujet afin de commencer à prendre conscience de ces pensées et de questionner le statu quo, de se demander si, vraiment, tu as envie de continuer à avoir ces pensées. Et d’avoir des pistes pour essayer des modifier.
Pour cela, on va commencer par parler très rapidement du capitalisme. Je te préviens, je ne suis pas du tout spécialiste du sujet, ça fait juste quelques mois que je commence à m’y intéresser, mais il n’empêche que c’est un mot qu’on entend partout, forcément puisqu’on vit dans une société capitaliste, c’est pourquoi je voulais essayer de le définir de manière simple, et certainement simpliste.
Alors, c’est quoi le capitalisme ?
Notre société capitaliste est structurée autour du principe d’accumulation de capital, principalement par une course aux profits privés. On peut dire que 5 ingrédients composent le capitalisme :
Le Capitalisme
Société structurée autour de l’accumulation de capital (tous les bien, toutes les richesses qui vont permettre la production de richesses) par la course aux profits privés. 5 ingrédients du capitalisme
- Facteur de production → le capital fructifie et sert à la production.
- Aliénation → le salarié ne possède pas les moyens de production, et n’a pas de droit sur les produits de la production.
- Hiérarchie entre classes → rapport de pouvoir entre les classes qui ont des intérêts divergents : capitalistes (ceux qui possèdent des capitaux) et travailleurs (doivent vendre leur force de travail) – il existe d’autres classes entre ces deux classes, bien entendu, la frontière n’est pas si nette. Le rôle d’une personne dans la société est fortement corrélée et dépendante de son rôle dans la production économique.
- Profit → condition d’emploi d’un salarié : que le coût de la personne soit inférieur à ce qu’elle rapporte. La différence est une source de profits, captés par les capitalistes, en partie réinvestis dans les entreprises, et accumuler encore plus de capital, et donc de profits.
- Compétition → et recherche de rendements croissants. Les capitalistes sont comme pris en otage par le système, qui les force à garder un certain rythme, voire à l’accélérer et toujours croître pour ne pas faire faillite, ou se faire rattraper par des concurrents. Cette accélération fait que l’on doit sans cesse être plus productifs, plus gros, plus rapides.
Il s’agit des principes de bases, et le capitalisme a évolué au cours des siècles.
Capitalisme intériorisé
Maintenant que tu as en tête les fondements du capitalisme, qui d’ailleurs a bien évolué au fil des siècles, passons au capitalisme intériorisé, avec une définition proposée par Anders Hayden, professeur de sciences politiques canadien : Le capitalisme intériorisé est cette idée que notre valeur est directement liée à notre productivité (source : USA Today). L’idée, c’est que nous ne sommes pas appréciés pour qui nous sommes, mais plutôt pour ce que nous faisons, et même plutôt, ce que nous produisons, les résultats de nos actions.
Productivité
Avant d’aller plus loin, j’aimerais faire un petit point sur la productivité, histoire d’être certaine que l’on parle tous de la même chose.
Voici la définition de la productivité que je propose pour la suite de cette discussion. La productivité, c’est accomplir une tâche donnée de la manière la plus économique possible. Pour mesurer sa productivité, il est donc intéressant de regarder le résultat que l’on a et les moyens que l’on a mis en œuvre pour obtenir ce résultat, comme le temps passé à la tâche, le coût financier, l’effort demandé.
Plus le résultat est satisfaisant, ou plus tu obtiens de résultats, par rapport aux moyens mis en œuvre pour l’obtenir, plus tu augmentes ta productivité.
7 signes que tu as internalisé les valeurs capitalistes
Article source (en anglais) : 7 signs you’ve internalized Capitalism
Maintenant que les bases sont posées, je vais vous parler d’un article qui liste 7 signes qui montrent qu’on a internalisé les valeurs et comportements du capitalisme. A toi de me dire si tu te reconnais dans la majorité de ces points, ou pas :
- Ta valeur est liée à ta productivité, à tes performances
- Se sentir coupable si on ne fait pas quelque chose de “productif”,
- C’est aussi une croyance qui va nous amener à être tout le temps overbooké. J’ai connu des personnes comme ça, et jusqu’à aujourd’hui, je me disais que c’était surtout un manque d’organisation ou une incapacité à se prioriser et à dire non. Mes recherches sur le capitalisme intériorisé me montrent une autre explication possible : en fait, la société valorise l’action et la productivité. Et, être “overbookée”, ça peut être le signe qu’on recherche une approbation extérieure, du type “ohlala, elles fait 1000 choses, elles est impressionnante, je ne sais pas comment elle fait”. Et j’imagine que cette recherche d’approbation n’est même pas consciente la plupart du temps. Mais je constate qu’en société, dire qu’on est très occupée, c’est BEAUCOUP plus valorisant que de dire qu’on est tranquille, qu’on a le temps. Clairement. Je voudrais apporter une petite nuance quant au fait que les gens qui sont occupés ne sont pas nécessairement productifs. Ce n’est pas parce que leur emploi du temps est rempli à ras bord que tout ce temps est un temps de productivité.
- On est dans une situation un peu paradoxale : on nous demande d’utiliser notre temps pour être extrêmement productif. Du coup, on valorise les personnes occupées, parce qu’occupée, ça veut certainement dire qu’elle fait plein de choses, et donc qu’elle est productive. Mais on ne peut pas être productif 100% du temps. Le cerveau a besoin de repos pour fonctionner correctement, et donc être plus productif. Donc on est sur une voie royale vers l’épuisement. Et c’est un terrain qui est ultra glissant !
- Par exemple, en tant qu’entrepreneuse sur le web, on nous parle d’organisation et de productivité, tout est tourné là-dessus, ainsi que sur la glorification de ces entrepreneurs qui travaillent très dur et qui ont de très bon résultats. Et qui sont en fait des exceptions face à tous les entrepreneurs qui travaillent dur et ne réussissent pas, par exemple (ici, notion de succès). Mais tout est fait pour qu’on s’engouffre dans cette spirale de l’épuisement, de l’occupation. Le glissement est facile, et c’est certainement pour ça qu’on voit autant de burn-out et d’épuisement professionnel.
- Tu priorises le travail face à la santé
- La société capitaliste tient les personnes responsables de leur bien-être. Si vous ne pouvez pas travailler, c’est de votre faute. Je pense que si on fait un sondage, 99% des personnes, si elles avaient le choix, elle ne tomberaient pas malades. Je ne connais personne qui est ravi d’être malade. Donc il faut arrêter avec ça. Surtout si relie ça au point précédent, l’épuisement amène certainement à tomber plus facilement malade. Je te laisse avec cette réflexion.
- Pour toi, il est normal d’avoir tout le temps le même niveau d’énergie, de travailler comme un robot (exemple du cycle hormonal féminin qui montre que ce n’est pas du tout le cas).
- Si tu priorises ta santé uniquement lorsque cela te permet de ne pas manquer le travail / pour être sûre de pouvoir travailler, c’est un signe de capitalisme intériorisé. Est-ce qu’on veut consciemment vivre dans un monde dans lequel on a ce genre de pensée ? Pour ma part : non.
- Pour toi, repos = paresse
- “Ne remet pas à demain ce que tu peux faire aujourd’hui”
- Tu te dis sans arrêt que tu feras une pause lorsque tu auras terminé telle tâche ou telle autre, et que si ce n’est pas terminé, tu ne mérites pas ta pause. Tu penses que tu dois “gagner” ton temps OFF.
- Tu te sens coupable lorsque tu fais quelque chose de plaisant, juste pour le fun (exemple : puzzle)
- Ce qui signifie que tu travailles tout le temps, sans temps mort. Ce qui conduit bien souvent au burn out.
- Il est important de réapprendre à faire des choses juste parce que tu en as envie. Et de ne pas chercher à en tirer de leçon (idée de post LinkedIn ironique : hier, j’ai fait ça et… je n’en ai pas tiré de leçon. Incroyable, non ?)
- Les activités ont des échelles de valeur
- Entre lire un roman ou un livre sur l’entrepreneuriat, il vaut mieux lire le deuxième livre et apprendre en même temps.
- Tout ce qui ne contribue pas à faire gagner de l’argent ou vous faire apprendre quelque chose est une perte de temps.
- Les activités qui servent en priorité des valeurs d’amour, d’amusement, d’empathie, de pleine conscience, de compréhension et de soin ont moins de valeurs que les autres activités.
- Tu priorises le travail par rapport aux relations humaines
- Tu es responsable de toi-même. Tu ne dois pas avoir besoin des autres.
- Pourtant, les relations avec les autres sont importantes pour une vie en bonne santé et heureuse.
- Ce sont les relations humaines qui donnent un sens à notre vie, pas les réalisations.
- Tu optimises tout pour ta croissance personnelle et financière
- Les désirs matériels sont illimités. Accumuler du capital et optimiser notre bien-être est la pierre angulaire du capitalisme. Tu vois ta trajectoire de croissance et tu en veux plus.
Alors, tu coches combien de cases ?
Mon score d’il y a quelques années : 7/7 (on ne sort pas de 30 années de syndrome de la bonne élève en un claquement de doigts 😂 )
Aujourd’hui, je travaille énormément le premier point (loin d’être acquis, mais ça va de mieux en mieux), je n’ai plus aucun problème avec les activités purement fun (car je sais qu’elles participent à mon bien-être en général), et j’ai de moins en moins de mal à prioriser ma santé et à “faire attendre” le travail lorsque c’est nécessaire.
Nous appartenons à un système
Il est important de dire que le capitalisme intériorisé (tout comme le sexisme intériorisé, le racisme intériorisé, etc.) est un problème principalement systémique, et pas forcément individuel. C’est un problème collectif, et pas individuel. A ce titre, il semble complètement utopique et irréaliste de penser qu’on va pouvoir s’extraire complètement de ce système de valeurs, et faire changer les choses par le simple pouvoir de notre volonté.
On peut noter que dans toutes ces phrases, on parle de “je”, de soi. Il me semble important de replacer tout cela dans un contexte, dans un système. Ces phrases, tu te les dis, tu te les répètes, mais leur source n’est pas dans ton esprit, il est dans la société, qui te les répète et te les montre depuis que tu es petite. Tu as donc internalisé tout ça, et maintenant, on te fait croire que tu as 100 % le pouvoir de t’en débarrasser puisque c’est toi qui est à l’origine de ça.
Si tu ne dois retenir qu’une chose de cet épisode, c’est que non, tu n’es pas 100 % responsable de ces pensées et que du coup, c’est tout à fait normal qu’il soit difficile pour toi de t’en défaire. TOUT, autour de toi, vient confirmer ces phrases. Que ce soit d’autres entrepreneuses qui n’ont pas conscience et/ou qui n’ont pas envie d’avoir conscience de ce paradoxe, et c’est OK, chacun a le droit de n’avoir pas envie de s’occuper de ça. Mais aussi les films, les séries, les success stories qui sont mises en avant par les différents médias. Les politiques mises en place également et les discours des personnalités politiques. Sans parler de ta famille, de ta conjointe ou ton conjoint, soit qui ne comprennent pas ce qu’est l’entrepreneuriat, soit qui te mettent la pression parce que tu ne gagnes pas assez, ou qu’ils trouvent que tu ne travailles pas assez, etc.
Sortir d’un mode de pensée qui est promu par un système dans lequel on vit, c’est compliqué ! Prendre conscience de tout ça, c’est le premier pas vers la déconstruction, et la reconstruction vers des modes de pensée qui te conviennent.
Je te propose d’arrêter là pour aujourd’hui, je t’ai déjà donné beaucoup d’informations, et je te propose de développer tout ça dans un deuxième épisode qui arrivera très rapidement.
En attendant, si tu veux réagir à certains points de l’épisode, ou juste en discuter, ou même m’apporter des informations complémentaires sur le sujet, ou d’autres points de vue, contacte moi par mail, sur LinkedIn ou sur Threads. C’est un sujet qui me tient vraiment à cœur, et donc en discuter plus longuement, ce serait un vrai bonheur pour moi.